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« Les jeunes n'ont plus aucun respect et plus rien ne les intéresse ! », « plus personne ne veut travailler ! », etc. etc. Qui n'a jamais entendu ou ne s'est jamais laissé aller à ces récriminations ? Cette « certitude » que le monde tournait bien mieux avant porte le nom de passéisme, ou la préférence exclusive pour le passé. Ce mécanisme est accentué par l’âge, souligne Serge Ciccotti, psychologue : les plus âgés se remémorent davantage les images positives, ils ont comme un filtre positif qui leur fait oublier les aspects négatifs de ce qu’ils ont vécu… Ce sentiment prégnant que « c'était mieux avant » ne date pas d’aujourd’hui. Horace dans son Art poétique, fustigeait déjà ses aînés comme nous l'indique cette citation (vers 173-174) : « Mille incommodités assiègent le vieillard […] Quinteux, râleur, vantant le temps passé, quand il était gosse, toujours à censurer les jeunes […]. » Alors était-ce vraiment mieux avant ? Creusons un peu.
L’illusion d’un déclin moral
Une analyse de sondages menés à travers le monde depuis 1949 montre que cette idée de la régression des valeurs morales est omniprésente, quels que soient les contextes sociétaux et historiques. Selon les sondés, ce déclin moral ressenti serait lié au fait qu’on devient de moins en moins vertueux en vieillissant et que les nouvelles générations sont plus immorales que leurs ainés. Des études de la revue scientifique Nature viennent contredire cette perception et affirment que la moralité aujourd’hui n’est pas forcément en baisse. Par exemple, la gentillesse, l’honnêteté, l’altruisme, le civisme et la générosité sont des valeurs toujours existantes. Autre remarque : les citoyens font des efforts croissants pour prendre soin de leur environnement. « Nous n’avons pas de données précises et historiques sur la moralité du quotidien, mais des mesures subjectives sont possibles. », indique Adam Mastroianni, psychologue et chercheur. Si les indicateurs objectifs tels que la colonisation ou l’esclavage sont facilement mesurables, il n’en va toutefois pas de même avec les actes de moralité du quotidien. Cette illusion d’un déclin moral est renforcée par deux biais cognitifs : le biais de la négativité et celui de la mémoire.
Deux biais cognitifs créent cette illusion
Des spécialistes dont Adam Mastroianni avancent une explication : cette illusion serait créée par la combinaison de deux phénomènes psychologiques connus, le biais de négativité et le biais de mémoire. Le biais de négativité relate le fait que les êtres humains prêtent plus d’attention aux informations négatives que positives. Les médias par exemple nous abreuvent d’événements négatifs – attaques terroristes, incendies, tsunamis, tueurs en série…notamment en raison de leur côté spectaculaire. Adam Mastroianni évoque le dicton anglo-saxon « if it bleeds, it leads », qui pourrait se traduire par « si le sang coule, le sujet fait la une ». Les personnes rassemblent donc plus d’informations négatives sur l’état moral actuel du monde… Le deuxième biais est celui de la mémoire. Nos souvenirs négatifs s’estompent plus vite que nos souvenirs positifs. « Si aujourd’hui, il vous arrive une bonne chose et une mauvaise chose, dans cinq ans, la mauvaise chose vous paraîtra moins négative et la bonne chose n’aura pas perdu son aspect positif », précise Adam Mastroianni. Et le psychologue de rajouter : « Ces deux phénomènes sont ancrés profondément dans notre cerveau. Ils existent pour une raison, particulièrement le biais de mémoire, qui nous permet de rationaliser et de mettre à distance les expériences négatives ». Le chercheur prône plutôt de faire preuve d’humilité sur nos perceptions du monde et du passé. « Nous n’avons pas les données, nous avons une illusion de compréhension », prévient-il. Cette perception faussée peut avoir des conséquences négatives sur nos sociétés qui peut conduire à un risque d’isolement des personnes, qui n’interagissent plus avec leur environnement, ne demandent pas d’aide, considérant que les autres sont « mauvais »...
Les relations amoureuses étaient-elles mieux avant ?
Certains nostalgiques soutiennent mordicus que c’était mieux avant, une époque où les déclarations d’amour se faisaient avec une plume, de l’encre et du papier et où l’on envoyait des colombes pour transmettre ses sentiments… Mais était-ce vraiment le bon vieux temps de l’amour, ou avons-nous juste oublié les désagréments pour ne nous rappeler que des bons côtés ? Nos grands-parents étaient-ils si malheureux de s’être unis à la première personne qui se présentait comme partenaire potentiel ? Aujourd’hui le « trop de choix » ne tue-t-il pas le choix ? L’énergie investie pour renouveler des rencontres et recommencer des histoires était probablement utilisée autrefois pour prolonger la relation et réparer certaines choses, ou pour compenser des manques dans la relation. Il y avait un sens du devoir différent de celui de maintenant. On ne partait pas facilement, mais si le partenaire n’était pas quelqu’un de bien, on gâchait probablement toute sa vie sentimentale… Les gens avaient des histoires plus longues mais elles n’étaient pas forcément synonymes de bonheur… Que d’interrogations contradictoires !
Ce sont les époques qui changent, les modes d’expression aussi ! En fin de compte, que ce soit avec des plumes ou des émoticônes, des sérénades ou des playlists, l’amour ne reste-t-il pas toujours le même ? Non, ce n’était pas « mieux » avant, c’était simplement différent ! Force est de constater que l’amour se trouve toujours mais d’une manière différente, que le romantisme existe toujours mais qu’il s’exprime autrement, notre site en est la preuve !
Que vous inspire ce sujet ? A votre avis, était-ce mieux avant ? Ou n’est-ce qu’une illusion ?
Photo © Adobe – Auteur : MendyZa
charlotte4575, 18.01.2024