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L’allongement de l’espérance de vie, ainsi que les mutations que traverse notre société (éclatement de la famille traditionnelle, crise économique…) nous poussent à repenser la question de la solidarité, en particulier envers les plus âgés. Si la nécessité de reconstruire du lien social chez ces personnes est évidente, nous verrons à travers les nombreuses initiatives qui fleurissent que la question de l’entraide est au cœur des préoccupations des seniors et que les plus actifs d’entre eux affichent une forte volonté d’y prendre part. Voici un tour d’horizon des formules d’entraide mises en place pour, et entre les seniors, et une réflexion sur l'évolution de l’entraide familiale.
Délitement du lien social
Nous vivons dans une société beaucoup plus individualiste qu’autrefois dans laquelle chacun a tendance à se replier sur lui-même et ses intérêts personnels. Ce sont les personnes âgées qui en sont les premières victimes. Une enquête de la Fondation de France publiée en 2014 a mis en lumière le sentiment croissant d’isolement dont souffre une grande partie des seniors. Francis Charhon, Président de la Fondation de France le commentait ainsi : « il y a un vrai délitement du lien social, notamment en ville. Il y a de plus en plus de personnes âgées qui n’attendent plus que le facteur, qui n’apporte que des factures ». Ces personnes sont plus touchées car plus soumises aux risques liés à la maladie, au handicap, à la perte de leur conjoint, à l’éloignement de leur famille. Pourquoi est-ton devenu si frileux à aller vers l’autre ? En ville, on connaît souvent à peine son voisin de palier ! Sans doute nos rythmes de vie ne nous laissent plus le temps de penser aux besoins éventuels des autres. Le sentiment d’être « dérangés » dans notre routine quotidienne, d’avoir à donner du temps, ce qui pourrait en plus se transformer en une sorte d’engagement nous met mal à l’aise. On n’ose pas non plus solliciter l’autre pour ne pas avoir l’air d’être en demande. On constate que l’isolement dont souffrent les personnes âgées s’inscrit souvent dans un cercle vicieux : moins elles ont de contacts avec l’exterieur, plus elles se sentent dévalorisées et moins elles osent aller vers les autres. Face à cette dégradation du lien social, on note heureusement le début d’une prise de conscience et une recrudescence des initiatives d’entraide.
Nouvelles formes d’entraide
Il existe évidemment de nombreuses formules d’aide à la personne proposées par le service public. Si le service « veiller sur mes parents » de la Poste a donné lieu à un débat houleux au moment de sa mise en place, il a eu le mérite de mettre en lumière ce phénomène d’isolement. En parallèle, des plateformes citoyennes d’entraide entre seniors sur le thème des déplacements, courses, animaux de compagnie, et du partage de loisirs voient le jour. Un nouveau courant tend également à se généraliser : l’intergénérationnel que l’on retrouve à travers des projets d’échanges de compétences et d’expériences entre jeunes et personnes âgées : les plus jeunes apportent leur aide dans le domaine informatique par exemple, tandis que les seniors proposent du soutien scolaire ou des cours de cuisine. On trouve également des initiatives de cohabitation intergénérationnelle mais aussi le développement de la colocation entre seniors. Ce mode de logement connaît un succès grandissant car il permet de répondre à nombre de contraintes qui pèsent sur les plus âgés : baisse du pouvoir d’achat, hausse des divorces chez les jeunes seniors, appréhension face à la perte d’autonomie, et manque de lien social. Des seniors ayant choisi cette formule témoignent de l’intérêt de mutualiser les moyens financiers pour pouvoir s’offrir des services extérieurs (ménage, aide à domicile, jardinage). Ils l’envisagent également comme un moyen de rompre la solitude, d’éviter un placement éventuel en maison spécialisée et insistent sur l’importance des échanges et de la pratique d’activités communes. Les plus fragiles s’assurent d’une présence et d’une aide en cas de difficultés.
Zoom sur l’entraide familiale
On a parfois l’impression que le rôle de la famille dans l’entraide à tendance à s’effriter du fait d’une plus grande mobilité géographique qui favorise l’éloignement des proches ou de la généralisation des divorces. Or les français, d’après une étude récente, restent attachés et pratiquent beaucoup l’entraide familiale. Il s’agit aujourd’hui plus fréquemment d’une aide morale, crise économique oblige, que d’une aide financière, exception faite des seniors « baby boomers » qui disposent d’un patrimoine souvent confortable. Si la forme d’entraide la plus courante reste celle de la présence des grands parents auprès de leurs petits enfants, on note des évolutions notables. On trouve par exemple de plus en plus de seniors jeunes, âges de 50 à 65 ans qui endossent le rôle d’aidants et assistent leurs parents très âgés. On observe un autre phénomène résultant de la crise économique : le retour à la maison de jeunes seniors ! « Dans certains cas, un système d’entraide se met en place : les parents vieillissants qui accueillent de nouveau leur enfant bénéficient ainsi de son aide gratuite à domicile… C’est gagnant-gagnant ! » explique le sociologue Serge Guérin.
Que vous inspire cette question de la solidarité chez les seniors ? L’entraide joue t-elle un rôle important? A quel niveau se manifeste t-elle ? Nous attendons vos réactions !
Photo © Fotolia – Auteur : nadezhda1906
charlotte4575, 04.04.2019